QUATZ Africa – Le photographe irano-allemand, Mahdi Ehsaei, a passé ces trois dernières années à recueillir des documents sur une communauté peu connue dans son pays d’origine : les Iraniens aux racines africaines.
Ses portraits, photographiés dans la province méridionale iranienne de Hormozgan, prouvent la participation du pays dans le commerce d’esclaves dans l’océan Indien jusqu’à ce que la pratique soit abolie en 1928. Les photos apparaissent dans son livre récemment publié, Afro-Iran, la Minorité inconnue.
Peu d’Iraniens sont conscients de cette partie de leur histoire ou même de la présence d’afro-iraniens dans leur pays, selon Ehsaei, qui a d’abord commencé à s’intéresser au sujet apèrès avoir observé une équipe d’Hormozgan jouant dans un match de football. Il a remarqué que le chef du club des supporters était un homme iranien noir qui faisait chanter aux supporters une chanson qui a frappé Ehsaei plus en tant qu’Africain qu’Iranien. Ehsaei a commencé à faire des recherches sur le sujet et a finalement récolté de l’argent en ligne pour financer une partie du projet.
Ehsaei a parlé à Quartz de son livre, de ce que cela signifie être afro-iranien et de l’importance de reconnaître les influences d’autres cultures dans un pays.
Ehsaei : Avant de commencer mes recherches, je n’avais jamais pensé que l’histoire des afro-iraniens remontait à des centaines d’années. Je n’étais pas le seul. De nombreux iraniens à qui j’en ai parlé ne savaient même pas que des iraniens noirs vivaient dans notre pays depuis des siècles. Il était très difficile pour moi de trouver des livres ou des informations sur cette communauté et il n’y avait pas non plus de documentation visuelle sur cette minorité.
Le fait le plus intéressant pour moi est que les afro-iraniens ont influencé la culture d’une région entière. Si vous allez dans le sud de l’Iran, vous voyez des gens avec des vêtements vifs et colorés et vous remarquerez également une différence dans la musique, les rythmes et le style de danse de ces personnes par rapport à d’autres parties de l’Iran.
Quel est votre but dans la représentation de cette communauté ?
J’ai délibérément dépeint des personnes qui ne sont généralement pas associées à l’Iran, qui ont à peine l’occasion de parler ou de jouer un rôle dans la représentation actuelle de l’histoire iranienne. Mon intention est de donner à la société une compréhension du visage non montré de ce pays. Afro-Iran traite de l’être humain, de son environnement et du paysage dans lequel il vit.
Avec le livre, je peux présenter les afro-iraniens largement inconnus au public. J’espère parvenir à atteindre un large public parce que, pour moi, c’est un chapitre non documenté de la diaspora africaine qui doit être raconté.
Comment les personnes que vous avez photographiées ont-elles réagi ?
Certains d’entre eux ont été surpris parce que je voulais dépeindre quelqu’un à la plage et que ce sujet était intéressant. Certains n’aiment pas être photographiés, certains comme [ça], et certains ne s’en soucient pas.
Lorsque j’ai eu l’opportunité d’avoir une conversation avec les sujets, leur point de vue a changé. J’ai expliqué les objectifs de mon projet et mes intentions, à savoir, que je voulais présenter et capturer des personnes diverses et moins connues des parties méridionales de l’Iran, dans mes portraits.
Comment décririez-vous la communauté afro-iranienne ?
Mis à part leur couleur et leur concentration dans des lieux particuliers, les afro-iraniens ne sont pas différents des autres Iraniens. Ils se sentent iraniens et se sentent mal à l’aise lorsqu’ils sont interrogés sur leurs origines. Certains d’entre eux connaissent leurs antécédents culturels, d’autres non.
Je me souviens d’un Iranien noir qui me disait comment, lorsqu’il se rendait dans une autre ville en Iran, les gens pensaient qu’il était un touriste. C’est quelque chose qui m’arrive aussi ici [en Allemagne], parce que je n’ai pas l’aspect d’un Allemand, aux yeux de certains. C’est un fait que certains Iraniens pensent que les Iraniens noirs ne ressemblent pas à des Iraniens. Ce genre d’opinion est ce que je veux changer grâce à mon travail.