CSDHI – Le secrétaire général de l’ONU se dit franchement préoccupé par l’usage de la torture en Iran. Un point qu’il soulève dans son rapport sur la situation des droits humains dans ce pays, à l’Assemblée générale de l’Onu en date du 6 septembre 2016 :
Torture ou peines ou traitements inhumains ou dégradants
20. Malgré l’entrée en vigueur, en juin 2015, de certaines garanties dans le cadre de la réforme du Code de procédure pénale, les mesures de protection contre la torture ne sont toujours pas conformes aux normes internationales. Le Code ne définit aucun crime de torture de manière précise. Les prisonniers risquent donc la torture et d’autres types de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Par ailleurs, le Code ne comporte aucune disposition détaillée sur l’exclusion, parmi les preuves recevables, de confessions obtenues sous la contrainte. Le Secrétaire général est préoccupé par la tendance actuelle consistant à utiliser la menace de torture ou la recours à la torture pour arracher à des prisonniers et à des personnes en garde à vue des aveux ou des dépositions contraires à leurs propres intérêts, notamment à des détenus politiques. Ces aveux sont souvent utilisés comme preuve recevable dans les procédures judiciaires. En outre, le droit des détenus de consulter un avocat au moment de la mise la détention n’est toujours pas garanti.
21. Les prisonniers politiques semblent particulièrement exposés au risque de torture. C’est le cas de Zeinab Jalalian, une Iranienne d’origine kurde, qui aurait été arrêtée par des agents du renseignement en mars 2008 tandis qu’elle allait de Kermanchah à Sanandaj. Les agents l’auraient rouée de coups de pieds, lui auraient ligoté les pieds et les mains et l’auraient emmenée au centre de détention de la place Naft (province de Kermanchah). Au cours de sa détention, Mme Jalalian aurait subi de longs interrogatoires et aurait été battue et mise au secret durant des mois. Elle aurait également été menacée de viol et soumise à d’autres formes de torture, aurait eu la tête cognée contre le mur et les pieds flagellés, et aurait été contrainte de retourner dans la salle d’interrogatoire avec des blessures aux pieds. Après un bref procès, un tribunal de première instance l’a condamnée à mort en décembre 2008. La peine aurait été confirmée par la cour d’appel du Kermanchah (voir A/HRC/WGAD/2016/1). Dans les observations qu’elles ont formulées sur le présent rapport, les autorités ont indiqué que Mme Jalalian était condamnée à mort pour avoir mené une action armée contre le régime, pour son adhésion au Parti de la vie libre au Kurdistan, pour transport et possession non autorisés d’armes et de matériel militaire et pour propagande contre le régime. Elles ont déclaré que Mme Jalalian avait récemment été graciée et que sa peine avait été commuée en réclusion à perpétuité.
22. L’état des prisons en République islamique d’Iran reste une source de préoccupation majeure, du fait de la surpopulation carcérale et des taux élevés de détenus. Ces 20 dernières années, 300 000 personnes en moyenne ont été détenues chaque année, dont la moitié pour des délits liés à la drogue. L’espace exigu, la piètre nourriture, le nombre insuffisant de toilettes et de douches et le manque de chauffage sont le lot de la plupart des lieux de détention.
Emprisonnement cellulaire
23. Les titulaires de mandat au titre de procédures spéciales ont continué de recevoir des rapports sur le recours généralisé à la mise au secret. Selon ces rapports, les autorités soumettraient régulièrement les détenus et les prisonniers à l’emprisonnement cellulaire pour une période pouvant aller d’une semaine à plusieurs années voire indéfiniment, dans certains cas. Par exemple, Mohammad Ali Taheri, fondateur d’un mouvement religieux, écrivain et défenseur de méthodes médicinales non traditionnelles pratiquées en République islamique d’Iran et à l’étranger, a été mis au secret depuis son arrestation en mai 2011. Il a été condamné à cinq ans de prison pour insulte au caractère sacré de l’islam. Bien qu’il ait purgé sa peine, il n’a pas été libéré.
24. Le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a déclaré que si l’emprisonnement cellulaire pouvait se justifier dans certaines circonstances et pour de courtes périodes, tout en s’accompagnant de mesures de protection adaptées et efficaces, son emploi prolongé, voire indéfini, ne pouvait pas être un instrument légitime, car il était source de souffrances physiques et mentales et bafouait l’interdiction absolue de pratiquer la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (voir A/HRC/31/57/Add.1).