CSDHI – Il a fallu une bonne dose de courage au prisonnier politique Reza Akbar-Monfared-Zadeh pour prendre sa plume depuis sa cellule en Iran et écrire au président de la République François Hollande dans le but de l’interpeller sur la visite d’Hassan Rohani fin janvier à Paris. Ce détenu sait que le prix à payer sera davantage de privation et de persécutions.
Monsieur le Président de la République François Hollande,
Je vous écris cette lettre en tant que prisonnier politique. J’ai d’abord été emprisonné dans les années 1980. Aujourd’hui je suis condamné à cinq ans et demi de prison, peine dont j’ai déjà purgé trois ans.
Ma sœur Maryam, plus jeune que moi, a été condamnée à 15 ans de prison. Elle est mère de trois enfants, dont l’un avait moins de 14 ans quand elle a été arrêtée. Cela fait six ans qu’elle est derrière les barreaux.
J’ai appris que vous vous apprêtiez à rencontrer ce criminel de Hassan Rohani, ce qui me consterne. Je voulais vous dire comment ma famille a été doublement victime de ce régime.
Le 18 septembre 1981, mon frère Ali-Reza a été fusillé sans le moindre procès ni la moindre chance de se défendre. Ensuite en 1985, un autre de mes frères Gholam-Reza, qui était depuis deux ans en prison, a aussi été fusillé. Puis au mois d’aout 1988, j’ai perdu ma petite sœur Roghieh et mon frère cadet Abdol-Reza dans le massacre des prisonniers politique. Ils étaient tous deux depuis sept ans en prison. Ils avaient été condamnés à trois ans mais en avaient fait quatre de plus. Ils ont été exécutés pour leur soutien aux Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI) et avoir vendu leurs journaux.
Je pense qu’il est bon que vous sachiez que notre famille n’a même pas eu la permission d’assister à l’enterrement des siens. Même certains des proches et amis venus présenter leurs condoléances à la maison ont été menacés et emprisonnés. Ma mère, écrasée de douleur, a aussi été emprisonnée quelques mois. Sous une pression inhumaine, elle est morte après avoir fait un AVC.
Tout au long de ces années et de ces crimes, Hassan Rohani a été l’un des principaux responsables, notamment pendant dix ans au poste de Secrétaire du Conseil suprême de sécurité national. C’est sous son autorité que cela s’est déroulé et il y a joué un rôle direct.
C’est pourquoi jusqu’à présent, l’Assemblée générale de l’ONU a condamné ce régime 62 fois pour ses violations des droits humain.
Aussi, moi ou n’importe quelle personne éprise de liberté, ne sommes-nous pas en droit de nous étonner et de nous affliger de la rencontre que vous comptez faire ou même de la permission accordée à ce personnage d’entrer en France ?
Or vous savez que sous son mandat plus de 2000 personnes ont été exécutées et quelles tueries ont été commises en Syrie, au Yémen ou en Irak ; nul besoin de le répéter.
En tant que prisonnier politique qui a perdu aussi cruellement ses frères et sœurs, fusillés, exécutés, massacrés, je vous demande si vous savez franchement qui vous allez rencontrer et quels crimes vous allez ainsi légitimer, et cela au nom de la France ?
Reza Akbari-Monfared-Zadeh
Prison de Radjaï-Chahr
Karadj
Le 14 janvier 2016