RadioFree-Europe – Le chef du pouvoir judiciaire iranien a tenté de revenir sur sa propre déclaration, selon laquelle les tribunaux en Iran évitent parfois les amputations ou les peines controversées en raison des critiques des droits humains formulées par l’ONU.
Mohammad-Jafar Montazeri a d’abord été cité lors d’une conférence sur la répression à Téhéran alors qu’il regrettait que de ces pressions aient forcé Téhéran à limiter le nombre de « châtiments divins », à savoir des amputations de mains de voleurs.
De nombreux groupes de défense des droits humains en Iran et à l’étranger dénoncent ces châtiments comme de la torture.
Le système iranien à dominance religieuse organise fréquemment des pendaisons et des châtiments corporels, sous forme de spectacles publics afin de décourager les criminels potentiels et il a été condamné pour son bilan en matière de droits humains, y compris le recours fréquent à la peine de mort et des informations occasionnelles sur les énucléations et lapidations.
Les propos tenus le 16 janvier semblaient être une rare reconnaissance, de la part d’un responsable iranien, de l’efficacité de la pression internationale pour obliger ce régime à améliorer son bilan en matière de droits humains.
« L’une des erreurs que nous commettons est que nous nous inquiétons de la propagande sous le prétexte des droits humains. Ils disent que nous traitons les voleurs avec violence », a déclaré Montazeri, le 16 janvier, selon l’agence de presse Fars.
« Mais, malheureusement, pour éviter d’être condamnés pour des problèmes de droits humains par les Nations unies, nous avons arrêté d’appliquer certaines punitions divines », a-t-il déclaré.
Cette remarque a attiré l’attention des défenseurs des droits de l’Iran, qui ont rappelé les centaines de peines d’amputation durant la décennie précédant 2017.
Mais Montazeri semble avoir rapidement fait marche arrière.
Cité ailleurs en marge de la même conférence, Montazeri a déclaré que les préoccupations relatives aux droits humains ne contraindraient pas le puissant pouvoir judiciaire à la clémence lors de l’application de peines prescrites par des principes religieux.
« Nous ne nous retirons pas de l’application ou du traitement modéré de nos punitions », a déclaré Montazeri, cité par une autre agence officielle, ISNA.
ISNA a ajouté que ces propos répondait à la question de savoir si « des excuses en matière de droits humains » inciteraient le pouvoir judiciaire à ajuster les châtiments islamistes.
En 2010, le secrétaire du « Haut Conseil iranien aux droits humains », Mohammad Javad Larijani, avait déclaré au Conseil des droits humains des Nations Unies que bon nombre des peines très critiquées prononcées en Iran étaient « justifiées par la culture et la religion ».
Les responsables iraniens condamnent publiquement les préoccupations des organisations des droits humains et des gouvernements occidentaux qu’ils considèrent comme une ingérence dans les affaires intérieures du pays. Ils emprisonnent ou harcèlent fréquemment les défenseurs des droits humains iraniens et leurs avocats.
Cependant, ils sont également sensibles à la manière dont le pays est perçu par le monde extérieur.
Montazeri a suggéré que moins de délinquants pourraient être condamnés à une amputation des mains, car « les règles de la jurisprudence islamique » rendent moins probable qu’un condamné réponde à tous les critères.
Dans le passé, l’Iran a imposé de nombreuses peines religieuses qualifiées de « cruelles » et d’ « inhumaines » par les groupes de défense des droits, notamment des lapidations, des amputations, des aveuglements et des flagellations.
En 2002, le pouvoir judiciaire a instauré un moratoire sur la lapidation. Il est difficile de suivre de tels cas dans le système judiciaire secret iranien, mais plusieurs condamnations à la lapidation auraient été prononcées et exécutées au cours des années écoulées. En 2010, à la suite d’un tollé international, la condamnation à mort par lapidation d’une femme iranienne accusée d’adultère a été annulée.
Seul un petit nombre des amputations signalées sont effectuées en public.
En janvier 2018, les médias locaux ont rapporté qu’un homme de 34 ans avait eu une main coupée en public en guise de châtiment pour avoir volé du bétail dans la province de Khorassan Razavi, dans le nord-est du pays. L’amputation a été dénoncée par Amnesty International comme une peine « indiciblement cruelle » qui met en lumière le « mépris total des autorités iraniennes pour la dignité humaine ».
Dans un cas particulièrement horrible, les autorités de Chiraz ont amputé la main d’un homme reconnu coupable de vol qualifié en avril 2017 avant de l’exécuter pour meurtre dix jours plus tard.
Lors de la conférence du 16 janvier, Montazeri a également reconnu une augmentation des délits et a laissé entendre que la situation économique du pays était un facteur contributif. « Le taux de criminalité augmente lorsque la population et la société font face à des problèmes économiques », a-t-il déclaré.
Le chômage et l’envolée des prix ont déclenché des manifestations de colère au cours des 13 derniers mois, et la monnaie iranienne a chuté lorsque les États-Unis ont repris leurs sanctions économiques pour punir ce que Washington considère comme une mauvaise conduite de la part de l’Iran.
Montazeri a déclaré que les peines de prison ne suffisent pas à lutter contre le vol et les cambriolages.
« L’emprisonnement a des conséquences négatives pour le prisonnier et pour la famille du prisonnier. Augmenter le nombre de prisonniers n’est pas dans notre intérêt », a déclaré à la presse Montazeri. « Il n’est pas logique pour nous de penser que nous pouvons empêcher un voleur de commettre un vol par l’emprisonnement ». Il a ajouté qu’il existe « bien d’autres » méthodes pour décourager le délit et a exhorté les experts à envoyer leurs suggestions.