CSDHI – Shabnam Madadzadeh a passé cinq longues années de sa jeunesse (2009-2014) dans les prisons des mollahs en Iran pour deux crimes impardonnables: avoir de la famille dans l’opposition et être elle-même dissidente. Désormais réfugiée à l’étranger, cette militante étudiante a brossé au fil d’une conversation bouleversante avec CSDHI les pages noires des prisons de femmes dans un Iran où la misogynie est la politique officielle en place. Chacune de ces pages fera l’objet d’un article particulier.
Pages noires des prisons de femmes en Iran
Le premier point que j’aimerais souligner, explique Shabnam, en dehors de toutes les conditions épouvantables que vivent les prisonnières de droit commun en Iran, c’est le procédé illégal de fabriquer des dossiers contre les inculpées, l’usage de la torture pour extorquer de faux aveux etbl’absence de droit à la défense et d’avocat. L’ensemble du système judiciaire est tourné contre les femmes emprisonnées pour des délits de droit commun, sans parler des politiques.
Les jeunes femmes arrêtées pour des infractions ou de ce que l’inquisition des mollahs considère comme des délits, sont d’abord emmenées dans des postes de détention illégaux, des caches qui n’ont rien d’officiel et où la loi, même celle des mollahs, ne passe pas le seuil. De fait les agents y laissent libre cours à leur sadisme. Dans ces centres, qui n’ont parfois même pas de nom, les femmes sont tellement sujettes à des harcèlements et des supplices, qu’elles avouent tout ce qu’on leur demande, qu’elles l’aient fait ou pas.
A Radjaï-Chahr (établissement pénitentiaire de la banlieue de Téhéran avec un nombre impressionnant d’exécutions), j’ai parlé avec plusieurs jeunes prisonnières qui avaient été violées à maintes reprises dans cette prison, un sort funeste qui attend celles qui ont le tort d’être jolies.
Abandonnées de tous
En raison de la violence des forces de sécurité, de la complexité des démarches à accomplir et des sommes très élevées que soutirent aux familles l’administration pénitentiaire corrompue, beaucoup renoncent à savoir ce qu’elles sont devenues. Et cet abandon laisse les mains libres aux interrogateurs pour s’acharner davantage sur ces malheureuses. Sans compter que lorsque le viol est annoncé aux familles dans le but de les briser, la culture misogyne imposée dans toute la société par les lois et la culture officielle, les familles modestes et traditionnelles rejettent leurs filles qui se retrouvent abandonnées de toutes parts.
De cette manière, le régime condamne à vie ces jeunes femmes en détruisant leur réputation, leur ôtant par la suite toute chance de réinsertion dans la société. C’est avec cette terrible souffrance morale qu’elles débarquent dans les prisons officielles, sans protection, vulnérables, et qu’elles tombent dans une atmosphère hautement corrompues qui ne leur laissent aucune chance. Et le premier piège est tendu par les gardiennes qui les happent dans le circuit de la drogue, pour en faire des épaves.