par Benito Perez
Le Courrier (Suisse), 7 août – Que faisaient le CICR et l'armée US alors que la police irakienne attaquait, les 28 et 29 juillet, le camp de réfugiés d'Achraf? La question était sur toutes les bouches, mercredi dernier à Genève, lors d'une conférence de presse convoquée par l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Au côté de Jean Ziegler et de proches des Moudjahidine du peuple (OMPI), l'ONG a exigé que la protection internationale promise aux résistants iraniens basés en Irak devienne effective. Dix jours après l'entrée des troupes de Bagdad dans le sanctuaire de l'OMPI sous couvert de «récupération de la souveraineté», le bilan «non contesté par les organisation internationales» se monterait à 13 morts et des dizaines de blessés graves. Une violence extrême dont témoignent les images insoutenables diffusées devant la presse. Mais autant que les images, c'est «la passivité incompréhensible de la communauté internationale» qui choque Eric Sottas.
Le secrétaire général de l'OMCT rappelle que les Moudjahidine sont des combattants ayant «déposé leurs armes» et, à ce titre, bénéficient de la «protection du droit humanitaire», comme l'a reconnu le Haut-commissariat pour les réfugiés. Garantie personnellement à chacun des 3600 habitants d'Achraf par l'ex-puissance occupante, cette protection avait été récemment transférée à Bagdad, malgré les avertissements d'ONG, dont l'OMCT: un gouvernement ouvertement hostile à une population n'étant pas le meilleur garant de sa sécurité! Ainsi l'attaque serait en fait une tentative d'intimidation des habitants. L'ONG parle d'ailleurs de «premier massacre»… Eric Sottas s'inquiète aussi du sort des 36 personnes détenues par les Irakiens et qui pourraient être livrées à l'Iran. «On sait ce qui les attendrait alors: torture et exécution sommaire.»
Le tableau est d'autant plus sombre que le CICR – garant des Conventions de Genève – garde le silence. «S'il a fallu 48 heures aux Etats-Unis pour envoyer des secours médicaux, le CICR n'a toujours pas bougé. Pourquoi?», s'interroge le socialiste portugais Paulo Casaca, proche de l'OMPI. Or, poursuit Eric Sottas, «c'est cette instance qui peut le mieux agir dans ce genre de cas». Révolté par cette «attaque effroyable», Jean Ziegler, vice-président du comité d'experts de l'ONU, est intervenu mardi auprès des autorités suisses, afin qu'elles secouent une communauté internationale honteusement passive «comme à Srebrenica». Selon l'ancien rapporteur sur le droit à l'alimentation, l'urgence serait de briser le «blocus» imposé depuis dix jours à la population d'Achraf. Une accusation rejetée par Bagdad. Enfin, MM. Ziegler et Sottas pressent les Etats de trouver une solution rapide et durable pour cette population dont personne ne veut et qui ne peut rentrer en Iran. Et M. Sottas d'évoquer un retour provisoire au protectorat US avant l'envoi d'une force de casques bleus.
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