RFI – Ces dernières années, avec l’aggravation de la situation économique et le développement de la pauvreté, le phénomène des « enfants de travail », c’est-à-dire des enfants qui travaillent, s’est accentué en Iran.
De notre correspondant à Téhéran,
A un carrefour du nord de la capitale iranienne, ils sont une demi-douzaine d’enfants à se faufiler entre les voitures. Le visage crasseux, certains ont à peine 5 ou 6 ans. D’autres sont plus âgés. Ils se jettent presque sur les voitures pour laver les vitres avec de l’eau souvent sale et obtenir un petit billet en retour. Les plus petits qui atteignent à peine les vitres des véhicules vendent divers produits ou réclament de l’argent aux automobilistes.
Les mêmes scènes sont visibles dans le métro, où de petits enfants passent leurs journées dans les rames pour vendre quelques produits. Depuis quelques années, on voit souvent de jeunes filles aux côtés des garçons.
Ailleurs, des jeunes de 14 ou 15 ans font les poubelles municipales pour ramasser les produits plastiques, qui sont ensuite mis dans d’immenses sacs qu’ils posent souvent dans les recoins des petites rues à l’abri des regards. Le soir venu, des petites camionnettes viennent ramasser ces plastiques qui sont emmenés dans une usine de retraitement qui les transforment de nouveau en produits plastiques recyclés.
Selon les autorités, il y a actuellement 1,7 million d’enfants travailleurs de moins de 18 ans dans le pays. Parmi lesquels quelque 30% sont d’origine afghane. Mais à Téhéran, les chiffres s’inversent. Il y a 60% à 70% d’enfants afghans et seulement 30% d’Iraniens. Si les enfants de rue sont visibles, ceux qui travaillent dans des ateliers de production ou dans l’agriculture ne le sont pas.
« Ces enfants issus de milieux pauvres sont une source de revenus pour leurs famille. Les enquêtes montrent que 95% de ces enfants rentrent à la maison après une journée de travail et leurs liens avec leurs familles ne sont pas coupés », déclare Amir Bagherzadi, directeur de l’Association pour la protection des enfants de travail, une ONG qui possède cinq centres, dont quatre dans les quartiers populaires sud de Téhéran pour aider les enfants travailleurs mais aussi leurs familles.
« En Iran, l’éducation est obligatoire jusqu’à l’âge de 13 ans. Et en principe, ces enfants n’ont pas le droit de travailler. Mais la pauvreté et les difficultés économiques poussent certaines familles à envoyer leurs enfants travailler pour subvenir à leurs besoins », ajoute M. Bagherzadi.
Quelque 500 enfants sont scolarisés directement dans ces cinq établissements et une aide sociale est apportée par l’Association à 1 400 autres qui sont scolarisés dans des établissements publics. « Une partie de ces enfants sont afghans. Il y a deux ans, le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, a donné l’ordre pour que ces derniers soient scolarisés en Iran, ce qui a beaucoup facilité les choses », ajoute encore M. Bagherzadi.
L’Association leur fournit, ainsi qu’à leurs familles, des livres, des repas chauds ou encore une aide médicale et psychologique. Beaucoup de ces enfants, issus de milieux pauvres, sont scolarisés le matin mais vont travailler l’après-midi, soit dans la rue soit dans des petits ateliers.
« Contrairement à une idée reçue, plus de 95% des enfants travailleurs vivent dans leur famille. Après une journée de travail, ils rentrent à la maison et retrouvent leurs parents et frères et sœurs. Ce qui permet de garder un lien affectif », affirme Leyla Abdolkarimi, une des responsables de l’Association.
De plus en plus visibles aux carrefours
C’est le cas de Mohammad, un jeune de 13 ans qui vient mendier les après-midis dans une rue passante du nord de Téhéran. Ses parents sont originaires de la région de la mer Caspienne, dans le nord du pays. « Je gagne environ 400 000 rials par jours », affirme-t-il. Ce qui représente à peine 3 euros.
Pour Afgham, une jeune afghane de 14 ans, qui lave les vitres des voitures à un feu rouge, la situation est la même. Son père, toxicomane est en prison et ses deux sœurs sont trop petites pour travailler. Elle apporte tout son argent à sa mère.
Avec la dégradation de la situation économique ces dernières années, le nombre des enfants travailleurs a augmenté. Surtout, on en voit de plus en plus aux carrefours des grandes villes, même si selon les responsables de l’Association pour la protection des enfants de travail, ils représentent une toute petite minorité par rapport aux enfants qui travaillent dans des ateliers ou dans les champs agricoles, et qui sont eux beaucoup moins visibles.