• Les fournisseurs de services contraints de réduire le débit d'Internet
• Pour les opposants, cette initiative va gêner l'évolution du pays
The Guardian, Téhéran, 18 octobre2006 - Robert Tait – Le gouvernement islamique d'Iran mène une nouvelle bataille dans sa guerre contre l'opposition politique nationale et l'influence de la culture occidentale en interdisant l'accès à l'Internet haut débit.
Dans une nouvelle mesure dirigée contre les utilisateurs d'Internet estimés à 5 millions dans le pays, les fournisseurs de services ont reçu l'ordre de réduire la vitesse d'Internet à 128 kilobits par seconde et l'interdiction de proposer des packs de connexion rapide. Cette initiative décidée par l'organisme de contrôle des télécommunications d'Iran va restreindre le téléchargement de musiques, de films et d'émissions de télévision étrangères, les autorités reprochant à ceux-ci de saper la culture islamique chez la jeune génération. Celle-ci va également empêcher les groupes d'opposition politique de s'organiser en téléchargeant des informations sur le net.
Cet ordre fait suite à une purge des paraboles illégales que des millions d'Iraniens utilisent clandestinement pour regarder des émissions de télévision occidentales. La police a saisi des milliers de paraboles ces derniers mois.
Cette dernière initiative a été condamnée par des députés, des sociétés de service Internet et des universitaires qui affirment que cette décision va ralentir le progrès de l'Iran. « Chaque pays du monde avance vers la modernisation et un élément majeur de celle-ci est l'accès à l'Internet haut débit », a affirmé Ramazan-Ali Sedeghzadeh, président de la commission parlementaire des télécommunications. « Le pays en a besoin pour son développement et pour avoir accès à la science contemporaine. »
L'Iran n'a pas répondu au paquet d'avantages proposé par l'Occident qui inclut une offre de technologie Internet dernier cri en échange de la suspension d'une partie cruciale du programme nucléaire du pays.
Une pétition qualifiant cette interdiction de l'Internet haut débit d' « arriérée et irresponsable » et ayant collecté plus de 1000 signatures a été envoyée au président Mahmoud Ahmadinejad.
Un grand nombre de sites et de blogs sont censurés au moyen d'équipements de filtrage haute technologie de fabrication américaine. L'Iran filtre plus de sites Internet que n'importe quel autre pays, hormis la Chine. Les liens haut débit peuvent être utilisés associés à des procédés anti-filtrage pour avoir accès aux sites censurés.
L'organisme de contrôle des télécommunications a refusé de donner les raisons de cette décision affirmant qu'elle avait été prise par « un groupe de responsables politiques ». Cependant, Etemad, journal pro-réformiste, a suggéré qu'elle faisait partie d'une campagne officielle visant à contenir l' « invasion culturelle » occidentale.
« Le bruit court que les motivations cachées sont les mêmes que celles qui ont conduit à la confiscation des paraboles », selon le journal.
Parastou Dokouhaki, célèbre blogueur iranien, a déclaré que cette initiative avait pour objectif de déjouer les actes des opposants au gouvernement. « Si vous voulez annoncer une manifestation à l'avance, vous ne le ferez pas sur des sites Internet officiels et les journaux ne l'annonceront que trop tard. C'est pourquoi vous allez télécharger l'information vers un serveur de manière anonyme et la diffuser. Interdire les liens haut débit rendrait cette procédure difficile. Même si elles disposent d'équipements télécoms, de technologie de fibre optique et d'infrastructures Internet, les autorités veulent que nous restions sous-développés. »
Ces mesures surviennent dans un contexte d'intensification des restrictions contre les médias. La semaine dernière, M. Ahmadinejad a lancé une attaque féroce contre le directeur de l'organisation audiovisuelle de l'Etat, IRIB, à qui il reproche d'avoir alimenté la crainte d'une inflation chez le public. Le principal journal réformiste d'Iran, Shargh, a été fermé le mois dernier.