CSDHI – Varya Saed Mouchashmi est détenu dans la célèbre prison de Rajaï Chahr à Karaj, en Iran, depuis qu’il a 17 ans. Condamné pour complicité de meurtre en 1998, il a été condamné à la peine capitale et à 80 coups de fouet. Cela fait 21 années qu’il est derrière les barreaux.
Dans une lettre obtenue par Hrana, Mouchashmi se souvient de l’incident qui a conduit à sa condamnation, déclarant que le meurtre était l’escalade involontaire d’un affrontement initié par un individu appelé Shahram Jalali. En accord avec la famille de la victime pour payer des dommages et intérêts (connus sous le nom du « prix du sang ») en échange d’une grâce, Jalili avait déjà payé la moitié de la somme demandée lors de son exécution en 2002. Esmail Hosseini a été libéré après avoir purgé trois ans et six mois de sa peine de dix ans de prison.
Voici le texte intégral de la lettre de M. Mouchashmi :
Au nom de la justice inexistante
Derrière les barreaux de l’âge de 17 ans à aujourd’hui, à l’âge de 40 ans … Où est la justice ?
Moi, Varya Saed Mouchashmi, je suis prisonnier à la prison Rajaï Chahr, à Karaj. Quand j’avais 14 ans, pour aider mon père âgé et ma famille, j’ai quitté ma ville, mes études et ma maison pour venir à Téhéran. En 1998, je travaillais comme ouvrier à l’aéroport international, Imam Khomeini, depuis trois ans et j’étais sur le point d’avoir 17 ans lorsque j’ai été reconnu coupable de complicité de meurtre et condamné à mort et à 80 coups de fouet.
Pourtant, lors de la bagarre qui a mené à l’assassinat de Mohammad Emami (la victime), la bagarre et le meurtre ont été le fait de Shahram Jalali – fils de Jamal, né à Rabat Karim – et d’une autre personne nommée Esmaeil Hosseini, condamné à 10 ans de prison mais libéré au bout de trois ans et six mois. Le principal accusé, Shahram Jalali, a été exécuté en 2002 avec le consentement des responsables légaux de la victime, après avoir payé la moitié du prix du sang correspondant au meurtre d’un musulman. J’étais innocent depuis le début, jeune et naïf, analphabète, soumis aux témoignages de mes co-accusés qui étaient totalement sans fondement. Le juge le sait, et pourtant je suis en prison depuis 21 ans.
En attendant, non seulement j’ai perdu ma jeunesse et ma famille, mais j’ai aussi tenté de me suicider à plusieurs reprises, dont les documents se trouvent à l’hôpital Imam Khomeini.
Pendant ce temps, la famille de la victime a négligé l’affaire et ma situation en prison. Sur la base de mes demandes et conformément à l’article 429, ils ont été convoqués à plusieurs reprises mais ils ont refusé de répondre. Enfin, en 2017, le procureur adjoint, M. Allahyari, a convoqué ma famille et moi-même pour fixer une caution de 18 200 euros.
Ma famille (il ne me reste que mon frère) a tout fait pour rassembler l’argent et payer la caution. Cependant, un autre procureur adjoint a été nommé entre-temps et la femme qui dirige actuellement le département conteste la peine de M. Allahyari et a insulté mon frère, le qualifiant « d’attardé et d’inutile pour la société ». Elle a déclaré que l’envoi de la caution et son paiement devaient maintenant recommencer.
Un an s’est écoulé depuis, et cela fait maintenant 21 ans que je suis en prison. Sur la base d’une loi adoptée en 2013, les mineurs ne peuvent être condamnés à mort, mais je continue à être puni et mon affaire continue d’être ignorée. À l’approche de mes 40 ans, je n’ai qu’un choix : commencer une grève de la faim pour rétablir mes droits et les défendre jusqu’à la mort. Je veux faire passer le message de l’injustice qui m’a été faite ; et pour que tous constatent leur négligence concernant mon affaire et l’attitude inconsidérée du nouveau procureur adjoint de la branche 1 et comment elle a entravé le processus.
L’article 429 n’est-il pas la loi du pays ? N’ai-je pas essayé de la respecter à quatre reprises ? Comment un changement de juge et de procureur adjoint (transféré entre branches) peut-il signifier un changement de loi ? Où est la justice ?
Qui sera tenu responsable des 21 années perdues de ma vie ? Tout ce discours sur la justice est-il une simple campagne de propagande destinée à tromper les médias et l’opinion publique ?
Le « principe de justice » sert-il simplement à dénigrer et à maltraiter verbalement les familles des prisonniers et, pour les juges, à leur reprocher des injures, à appliquer à leur gré des sentences arbitraires ?
Varya Saed Mouchashmi, de la prison de Rajaï Chahr à Karaj, le 17 août 2018
Source : Les droits de l’homme en Iran