IFEX – Une Guerre douce idéologique menée par le régime menace de maintenir les citoyens iraniens isolés du reste du monde et incapables d’exercer leurs droits à la liberté d’expression et d’information. La déclaration suivante a été publiée à l’origine sur « article19.org », le 3 février 2017.
En dépit d’être l’un des principaux cyber pouvoirs de la région, l’Iran est l’un des pires contrevenants vis-à-vis des normes internationales concernant Internet, violant systématiquement les droits de l’homme exercés en ligne et utilisant des tactiques en ligne pour limiter les droits exercés hors ligne. Une guerre douce idéologique conduite par le régime menace de garder les citoyens iraniens isolés du reste du monde et incapables d’exercer leurs droits à la liberté d’expression et d’information. Afin de comprendre comment relever les défis de la liberté d’expression en Iran à la fois hors ligne et en ligne, il est essentiel de comprendre comment le contrôle en ligne est mis en œuvre et maintenu.
La guerre douce est restée d’une grande importance pour le régime iranien, avec une augmentation de l’activité après les élections controversées de 2009, cinq mois après que le guide suprême, l’Ayatollah Khamenei, ait déclaré : « Aujourd’hui, la priorité du pays est de lutter contre la douce guerre de l’ennemi ».
La société civile internationale, de même que des groupes et des individus au sein de l’Iran, y compris des membres des institutions iraniennes elles-mêmes, ont longuement discuté d’une « cyber-armée iranienne » – un groupe organisé doté d’une supervision officielle et du soutien du gouvernement iranien. L’origine et la structure de ce groupe sont extrêmement difficiles à établir, mais il existe des preuves évidentes concernant les acteurs et les tactiques en ligne, dont font partie les actions et les buts qui s’alignent souvent avec ceux des autorités iraniennes, même en fonction de cet agenda politique. Les individus et les groupes ciblés par ce groupe sont souvent la société civile, les militants et les groupes d’opposition politique, bien que les iraniens de la diaspora soient aussi ciblés, ainsi que les entités étatiques considérées comme une opposition ou une menace (y compris le ministère américain de la justice).
Il existe deux types distincts d’activités en ligne qui contribuent à l’hégémonie de l’idéologie et du discours de l’Etat : le premier est le contenu de la guerre douce elle-même en ligne – la production et la promotion du contenu idéologique sanctionné par l’État, avec la restriction du contenu apparent pour menacer les valeurs politiques et culturelles de la tradition iranienne.
Ceux qui expriment leur désaccord, y compris les militants sociaux et les militants des droits de l’homme (qui fréquemment sont en échec quand il s’agit d’adopter les précautions nécessaires de sécurité en ligne, tels que des mots de passe complexes et l’anonymat en ligne) sont surveillés et même arrêtés. A cours des interrogatoires subséquents, ils sont souvent soumis à la torture et à d’autres mauvais traitements : les autorités obtiennent ainsi des informations clés – communications, comptes en ligne, antécédents web – qui permettent de persécuter d’autres cibles d’intérêt. C’est l’une des techniques les plus efficaces pour recueillir des informations sur les militants des droits de l’homme.
Le deuxième type d’activité est la cyberattaque, c’est-à-dire le piratage : les logiciels malveillants intrusifs, la surveillance et, par exemple, les attaques DdoS menées contre des acteurs perçus comme étant en opposition avec l’idéologie étatique : les cibles sont présumées être sélectionnées par les acteurs étatiques et la société civile et les adversaires politiques se sont révélés être les cibles principales de telles tactiques intrusives. Cela non seulement interfère directement avec les activités et les publications des organisations censées s’opposer au gouvernement, mais cela peut également conduire à de l’information utilisée pour arrêter et poursuivre des individus ou des groupes dissidents. Il est important de noter la difficulté de faire des recherches sur les actions et les groupes de piratage, particulièrement pour déterminer l’attribution et l’intention des actions intrusives en ligne.
Peut-être que le plus grand succès de la campagne en ligne du gouvernement iranien, du moins au niveau national, est « l’effet dissuasif » : l’instauration d’un climat de crainte qui surpasse les capacités réelles de surveillance et encourage les communicateurs en ligne et les activistes à l’autocensure. Il serait impossible de maintenir une censure fourre-tout ou un contrôle de programme, mais en instillant un sentiment de peur chez les citoyens iraniens, la surveillance et le blocage peuvent ne pas être intégraux.
Ce rapport vise à fournir un aperçu des tactiques en ligne et des réseaux actifs dans la guerre douce de l’Iran, en utilisant une combinaison de sources primaires, des entretiens et une collection de métadonnées.