Human Rights Watch – Les gros titres sur un terrible féminicide (décapitation de Ghazaleh (Mona) Heydari, 17 ans), a secoué la société iranienne début février 2022. La police a arrêté le mari et le beau-frère de la victime. Puis, elle a déclaré que le motif était un « différend familial. » Heydari, qui vivait dans la province du Khouzistan, aurait été mariée à son cousin à l’âge de 12 ans et aurait eu un enfant de trois ans.
Un féminicide revendiqué par le mari
Une source proche de la victime a rapporté que Heydari avait tenté d’échapper aux violences domestiques en s’enfuyant en Turquie. Mais, des proches parents l’avaient ramenée en Iran. Des médias et des groupes de défense des droits ont rapporté qu’on a filmé un homme, qui serait son mari, en train d’errer dans les rues de la ville d’Ahwaz, dans la province du Khouzistan. Il tenait un couteau et la tête d’Heydari.
Heydari est une victime de plus dans une série de féminicides en Iran. Dans la seule province du Khouzistan, un rapport de la BBC Perse a montré que les meurtres qualifiés de « crimes d’honneur » dans les enquêtes constituaient environ 39 % de tous les meurtres entre 2013 et 2017. En vertu du droit iranien, si les familles des victimes assassinées ne demandent pas de « qisas », un concept permettant une rétribution en nature (la loi du Talion) et conduisant à une condamnation à mort, les autorités peuvent toujours condamner un meurtrier à une peine allant jusqu’à 10 ans de prison. Mais dans de nombreux cas de féminicides, les familles sont liées à la fois à la victime et au meurtrier, et elles ne font souvent pas pression pour obtenir les peines les plus sévères. Les procureurs ne demandent souvent pas de peines plus longues, et les juges libèrent ces condamnés après qu’ils aient passé quelques années seulement en prison.
Plus de 20 années de lutte pour dénoncer les féminicides perpétrés en Iran
En Iran, les militants des droits des femmes font campagne depuis près de vingt ans en faveur d’une loi sur la violence à l’égard des femmes. Les autorités travaillent sur un projet de loi depuis huit ans. L’année dernière, un projet de loi sur la « protection, la dignité et la sécurité des femmes contre la violence » a été présenté au Parlement. La loi comprend des dispositions positives, notamment l’obligation pour les autorités d’accélérer les enquêtes sur les plaintes pour violence domestique, la formation d’unités de police spéciales pour enquêter sur ces abus, l’établissement d’ordonnances de restriction et la création d’un fonds pour soutenir les victimes de violence domestique. La loi présente toutefois de nombreuses lacunes, notamment l’absence de criminalisation du viol conjugal ou du mariage des enfants. Elle ne donne pas non plus de définition claire de la violence domestique.
L’administration et le parlement iraniens doivent donner la priorité à la réforme du projet de loi sur la violence à l’égard des femmes. Ils doivent la mettre en conformité avec les normes internationales avant de l’adopter. Il ne devrait pas être nécessaire de commettre un crime flagrant comme une décapitation pour qu’ils agissent, et ne pas faire avancer la loi ne fera que mettre en danger la vie de davantage de femmes et de jeunes filles.