CSDHI – Le prisonnier politique Mohammad Nazari, incarcéré à Téhéran depuis 23 ans, a déclaré à la Campagne internationales pour les droits de l’homme en Iran que le pouvoir judiciaire a refusé sa demande urgente de permission de sortie médicale, prétendant avoir « perdu » son dossier.
« J’ai passé plus de la moitié de ma vie en prison », a déclaré Nazari, parlant de la prison de Rajai Shahr, dans une interview exclusive à la Campagne le 12 janvier 2017. « Ce n’est pas un problème ; Je ne veux rien de ce régime … Je ne demande pas la liberté … Je veux juste une permission pour aller à l’hôpital ».
« Suis-je condamné à mourir comme les autres ? », ajouta-t-il. « Qu’est-ce que je suis supposé faire ? Nous avons des droits dans ce pays. Où est mon dossier ? Est-il perdu ? Comment cela se fait-il ? Même un fou ne pourrait pas accepter cette situation ».
« J’ai malaux cervicales », a poursuivi Nazari. « Le mois dernier, un spécialiste m’a prescit d’aller à l’hôpital, mais ni le tribunal de Karaj ni celui de Téhéran n’ont répondu à mes demandes de sortie médicale. Le directeur de la prison a bien écrit une lettre en mon nom, mais rien n’a été fait. Parfois, j’ai les mains et les jambes qui deviennent complètement molles. Les médecins de la prison ne savent vraiment pas de quoi il s’agit ».
Les prisonniers politiques en Iran reçoivent systématiquement un traitement discriminatoire, y compris le déni de traitement médical nécessaire.
Né le 11 juillet 1971, Nazari a été arrêté par des agents du ministère iranien des renseignements dans la ville de Boukan, située dans une province à l’ouest de l’Azerbaïdjan, le 30 mai 1994. Six mois plus tard, la branche 1 du tribunal révolutionnaire d’Orumiyeh présidée par le juge Abdolahad Jalilzadeh l’a condamné à mort pour son appartenance présumée au Parti démocratique du Kurdistan iranien (PDKI), un groupe d’opposition cherchant l’autonomie pour la région kurde en Iran.
La peine de Nazari a été réduite à la prison à vie en 1999 au milieu de la fête islamique d’Eid Qorban, lorsque le Guide suprême, sur recommandation du pouvoir judiciaire, accorde traditionnellement son pardon à quelques prisonniers.
Les membres des minorités ethniques ou religieuses en Iran qui critiquent le gouvernement sont visés par le pouvoir judiciaire pour recevoir un traitement particulièrement sévère et il existe une histoire bien documentée de la magistrature mettant en cause de façon disproportionnée la peine capitale pour les militants appartenant à des minorités.
« Je suis coincé. Les responsables judiciaires des villes de Karaj, de Téhéran et de Mahabad disent tous que ce n’est pas leur problème », a ajouté Nazari. « Ils disent qu’ils ont perdu mes dossiers, mais peut-être qu’ils veulent m’arnaquer ».
Lettre de pardon ou piège ?
« L’année dernière, un représentant du ministère des renseignements est arrivé en prison et nous avons parlé près d’une heure ensemble », a déclaré Nazari à la Campagne. « Il a dit, donnez-nous un engagement que vous ne retournerez pas vers les mêmes activités politiques. J’ai dit, OK, je vais prendre cet engagement, mais seulement après avoir été libéré, pas pendant que je suis toujours en prison ».
Il a poursuivi : « Nous avons eu beaucoup de cas de prisonniers qui ont signé des lettres de pardon et ont supplié le pardon et sont en train de dépérir en prison. C’est vrai. Il y en a beaucoup et ils meurent en prison. Je les vois et je perds vraiment espoir. J’ai eu un avocat une fois, mais il a renoncé à me défendre sans aucune explication. Qu’est-ce que je peux dire ?
« Des milliers et des milliers de sympathisants du PDKI marchent dans les rues librement. Alors pourquoi suis-je en prison ? Selon la loi, être un sympathisant PDKI n’est pas un crime, pas même dans ce pays », a-t-il ajouté.
« Ces gens n’ont aucune idée de ce que signifie la vie en prison », a-t-il dit. « Ils n’ont jamais vécu une incarcération et pourtant ils prononcent des condamnations à perpétuité par kilo ».
En août 2002, Nazari s’est cousu les lèvres et s’est mis en grève de la faim pour demander une révision de son dossier, mais aucune de ses demandes, ni celles de sa famille, n’ont été prises en considération par le pouvoir judiciaire, a-t-il déclaré à la Campagne.
« Je n’ai personne pour s’occuper du suivi de mon affaire », a-t-dit. « J’ai écrit un millier de lettres à chaque autorité, vous pouvez l’imaginer, mais je n’ai pas demandé pardon parce que je n’ai rien fait de mal. Je n’ai commis aucun péché. Je n’ai volé personne ni même regardé d’une mauvaise façon la femme de quelqu’un. La seule chose qui m’a gardé en prison toutes ces années, ce sont les préjugés de l’État envers mes croyances.
Source : Campagne Internationale pour les droits de l’homme en Iran