Agence France Presse, 09 novembre 2006 – La justice argentine a confirmé jeudi sa demande d'arrestation de plusieurs dirigeants iraniens, dont l'ex-président Rafsandjani, qu'elle accuse d'être derrière l'attentat meurtrier contre une association juive, qui avait fait 85 morts en 1994.
Le juge Rodolfo Canicoba Corral a précisé à l'AFP avoir délivré un mandat d'arrêt international pour "crimes contre l'humanité" à l'encontre de l'ancien président Akbar Hachemi Rafsandjani et d'autres dirigeants iraniens qu'il accuse d'être, avec le parti chiite libanais Hezbollah, derrière l'attentat contre l'Association mutuelle israélite argentine (AMIA), qui avait fait 85 morts et 300 blessés en juillet 1994.
Le magistrat a indiqué avoir transmis ces demandes d'arrestation à Interpol et au ministère argentin des Affaires étrangères pour qu'elles parviennent par la voie diplomatique à Téhéran.
La décision de commettre l'attentat "a été prise par les plus hautes autorités de la République islamique d'Iran, qui a chargé le Hezbollah de réaliser l'attaque", avait déclaré le 26 octobre Alberto Nisman, le chef d'une équipe de procureurs chargés de cette enquête.
Ce magistrat avait alors réclamé un mandat d'arrêt international à l'encontre des plus hautes autorités du gouvernement iranien de l'époque, demande que le juge Corral a confirmé jeudi.
Ce dernier avait toutefois laissé entendre fin octobre que les arrestations demandées seraient probablement difficiles à obtenir.
"D'abord, je pense qu'il s'agit d'un thème de politique extérieure et, en tant que citoyen, j'ai la sensation que ça rend l'affaire très compliquée", avait-t-il alors déclaré.
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que la justice argentine met en cause l'Iran dans cet attentat, le plus meurtrier jamais commis en Argentine.
Le juge Juan Jose Galeano, qui mena l'enquête pendant neuf ans, avait ainsi désigné comme chef de l'opération Moshen Rabbani, conseiller culturel de l'ambassade d'Iran à Buenos Aires, avant de se voir retirer l'affaire à cause d'irrégularités de procédure.
Cette accusation provoqua de fortes tensions entre Buenos Aires et Téhéran, qui arrivèrent à leur comble en 2003 lorsque, sur mandat argentin, la justice britannique arrêta l'ex-ambassadeur iranien en Argentine, Hadi Soleimanpour, avant de considérer insuffisantes les preuves et de le remettre en liberté. Le juge Corral a renouvelé jeudi la demande d'arrestation de l'ex-ambassadeur.
Les autorités argentines ont été vertement critiquées pour les carences de l'enquête qui n'a jamais permis de retrouver les auteurs de cet attentat meurtrier.
Le président argentin Nestor Kirchner, mis sous pression par l'importante communauté juive d'Argentine, forte de quelque 300.000 membres, avait reconnu en 2005 la responsabilité de l'Etat dans ces défaillances successives.
Les présidents de la Délégation des associations israélites argentines (DAIA), Jorge Kirszenbaum, et de l'AMIA, Luis Grynwald, avaient réclamé fin octobre du gouvernement qu'il demande aux Nations unies de prendre des sanctions à l'encontre de l'Iran.
L'AMIA affirme depuis longtemps que l'Iran a organisé l'attentat et en a confié la réalisation à des membres du Hezbollah. Ces accusations, fondées sur des renseignements des services secrets argentins, américains et israéliens, ont toujours été rejetées par Téhéran et le Hezbollah.