Prison d'Evine, dimanche à l'aube, les gardes ont fait monter leurs douze victimes sur deux plates-formes. Système rodé. Les cordes ont été enroulées au tour des poutres à intervalles réguliers. Les plates-formes ont des roulettes. Une corde rouge est prête à les retirer de dessous les pieds des condamnés. A moins que ce ne soit les gardes postés aux extrémités. Dans les deux cas les prisonniers vont souffrir. C'est prévu pour.
Les victimes sont alignées comme à l'abattoir. De tous âges, de toutes conditions.
Alors qu'approche l'anniversaire du massacre de 30.000 prisonniers politiques de la fin de l'été 1988, dont une grande partie avait péri dans cette même prison d'Evine, sous les balles, à la potence, ou même à la dynamite dans les cellules, à un rythme effroyable, comment ne pas penser, en voyant cette scène insoutenable, que ce régime barbare ne se lance pas dans un nouveau massacre. D'autant plus qu'après les émeutes de l'essence, il s'était empressé d'annoncer qu'il y aurait une vingtaine d'exécutions.