CSDHI – Un groupe d’activistes luttant contre le phénomène du féminicide en Iran affirme avoir documenté 191 cas en 2022, ce qui équivaut à environ un meurtre tous les deux jours, mais le nombre réel est probablement plus élevé en raison de la sous-déclaration des membres de la famille et des autorités.
Dans son rapport annuel, publié le 8 mars, StopFemicideIran (SFI), une initiative de l’Alliance pour les droits de toutes les minorités (ARAM), indique que le nombre de fémicides documentés – le meurtre d’une femme ou d’une fille en raison de son sexe – a augmenté de 17 % par rapport à l’année précédente.
Selon la SFI, cette augmentation pourrait être le résultat d’une « tendance plus marquée de la société à signaler les cas et d’un taux accru de féminicides impliquant le gouvernement iranien ».
Ce rapport est publié alors que des mois de manifestations nationales ont été organisés pour réclamer davantage de libertés et de droits pour les femmes en Iran. Le mouvement de protestation mené par les femmes a été déclenché par la mort, en septembre, d’une jeune femme de 22 ans, Mahsa Amini, détenue par la police pour des raisons de moralité.
Le féminicide toucherait les jeunes femmes
Selon la SFI, les victimes de fémicides sont principalement des jeunes femmes âgées de 20 à 35 ans.
Dans la plupart des cas, les noms des victimes ne sont pas connus du public, ce qui, selon SFI, « peut faire partie d’une stratégie visant à protéger les familles touchées des répercussions sociales ou à enterrer l’identité des victimes ».
Le rapport souligne que le mariage des enfants expose les femmes et les jeunes filles au risque de fémicide. Il cite le cas d’un homme décapité par sa femme de 17 ans en février 2022, après que celle-ci ait tenté de fuir leur domicile « parce qu’elle se trouvait dans un mariage abusif auquel elle avait été forcée de consentir à l’âge de 12 ans ».
Le rapport insiste sur le fait que le féminicide n’est pas un problème ethnique ou rural. La plupart des provinces ont connu des incidents l’année dernière, et environ un tiers de tous les cas enregistrés ont été commis à Téhéran. Un nombre similaire de cas s’est produit dans les provinces orientales de l’Azerbaïdjan occidental, du Kurdistan, de Kermanshah, d’Ilam, de Khuzestan et de Bushehr réunies.
Dans environ 20 % des cas de féminicide, les auteurs ont tué leur victime à mains nues, en la battant, en l’étranglant ou en la jetant du haut d’un bâtiment. Un pourcentage similaire de victimes a été abattu.
Dans la plupart des cas, l’auteur était connu de la victime, le mari étant impliqué dans la commission du meurtre dans près de la moitié des cas. Les autres auteurs étaient le petit ami, le frère, le père, le fiancé, l’ami de la famille, les membres masculins de la belle-famille de la victime, le voisin, le fils ou l’oncle.
Dans environ 20 % des cas, l’auteur est inconnu ou n’a pas été signalé
Dans plus de la moitié des cas, les conflits familiaux et autres sont les principales excuses invoquées par les auteurs pour justifier les féminicides, et ces arguments sont parfois d’une grande banalité. En août 2022, un homme aurait tué sa femme à Téhéran parce qu’elle passait trop de temps sur son téléphone portable.
Une forme courante de féminicide est le « crime d’honneur », défini comme un crime commis au nom d’un soi-disant honneur et dont les auteurs sont généralement des membres masculins de la famille.
Les informations disponibles sur les cas de féminicides documentés suggèrent que les auteurs ne font souvent l’objet d’aucune accusation ou ont été condamnés à de faibles peines, une situation qui, selon la SFI, « risque de créer une culture de l’impunité autour du féminicide ».
Source : Iran Wire